Deux annonces font l’évènement cette semaine. Elles n’ont apparemment rien en commun mais montrent la sophistication et la segmentation croissantes des marchés indiens:
- Hermès ouvre le premier magasin de marque occidental en Inde à destination des clientèles les plus aisées de Mumbai
- Le Gouvernement lance Aakash, la tablette PC la moins chère du monde, à destination des clientèles les moins aisées
Ouverture du magasin Hermès à Bombay
Tout le monde se dit qu’il aurait dû y penser plus tôt, mais c’est Hermès qui le fait le premier: La marque ouvre une boutique à Bombay en lançant une gamme de saris de luxe qui coûteront… entre 4000 et 6000 euros (soit le prix de 250 tablettes PC Aakash environ).
Saris de Luxe Hermès
Inspirés des fameux foulards Hermès, qui reprennent souvent des motifs indiens, les saris Hermès marquent la première tentative d’une marque de luxe occiendentale de créer des produits spécifiques à l’intention du marché indien.
blouse de sari
Les photos ci-dessus sont peut-être susceptibles d’attirer les clientes qui rêvent d’une carrière de star, mais rares seront celles qui porteront les saris Hermès sans les blouses traditionnelles. En Inde, il faut rester indien et porter des vêtements occidentaux – des robes qui montrent les épaules en particulier – est un signe de mauvaise vie et sera considéré comme une provocation. Seules les actrices de Bollywood peuvent s’y risquer, et encore, elles prennent un risque sérieuxde ternir leur réputation.
L’ouverture du magasin de Bombay marque la volonté d’Hermès de sortir du ghetto des hôtels de luxe où sont confinées les maques occidentales comme Louis Vuitton, Yves Saint Laurent… La marque tente d’aller à la rencontre de ses clientes indiennes dans les situations les plus formelles, où le port du sari est de rigueur, en particulier les mariages qui drainent l’essentiel des achats de luxe en Inde. La cérémonie de mariage est devenue l’expression la plus visible de la position sociale et de la richesse d’une personne; c’est une expression que tout le monde accepte et même attend. Une carte d’invitation peut coûter 60 dollars; multipliez le prix par 2000 ou 3000 invités et imaginez que ce n’est qu’une petite dépense parmi d’autres, vous avez une idée. En Inde, il n’est pas rare de dépenser 2 millions de dollars ou plus pour un mariage. Alors un sari à 6000 euros…
Nombreuses sont les marques de luxe qui espèrent que le marché indien s’ouvrira de plus en plus aux standards occidentaux. Beaucoup pensent que c’est peine perdue, comme le montre la difficulté du secteur à décoller en Inde, y compris pour les produits les plus accessibles comme les parfums et les cosmétiques. L’Inde reste au moins quinze années derrière la Chine en terme de développement du marché du Luxe et ne compte que pour 1% du marché mondial.
Lancement du Tablet PC le moins cher du monde
S’il est produit à 1 million d’exemplaires, Aakash (ciel) coûte 49.99 dollars à produire, sera fabriqué en Inde, et sera vendu 35 dollars, subvention du Gouvernement comprise. L’objectif du Gouvernement est de « sortir l’informatique de sa cage économique » et de combler le retard des populations défavorisées en matière d’accès à internet. Avant tout destiné aux étudiants, il tourne sous Android et offre 2 GB de mémoire, le WiFi, et 2 ports USB qui permettront d’accéder à l’internet par une clé 3G.
Aakash
Le Gouvernement a fourni 200 Aakash à des étudiants qui sont en train de le tester. Il en aurait d’ores et déjà commandé 100 000.
Nombreux sont ceux qui doutent de son succès: On n’en est pas à la première tentative, les contenus sont encore à développer, la batterie dure moins de 2 heures, comment la recharger dans des zones rurales où les coupures d’électricité sont très fréquentes? La connectivité internet (sans parler du WiFi) n’est pas disponible partout. Les circuits de distribution ne sont pas encore clairs: Le Gouvernement l’enverra-t-il aux Universités ou pourra-t-on l’acheter en magasin? Seules les applications Android pré-installées vont tourner (pas de market place…)
Bref, comme souvent en Inde, on redoute l’effet d’annonce.
Aakash montre cependant la capacité de l’Inde à relever le défi de « l’indigénisation », c’est à dire adapter les caractéristiques et les coûts d’un produit occidental aux conditions de marché indiennes: Un Tablet PC à plus de 500 dollars n’intéresse qu’une petite partie de la population; à 35 dollars, c’est un tout autre marché qui s’ouvre.
Le principal défi a été celui de la réduction des coûts: Au lieu d’importer des modules complets et de les assembler, Datawind, la société qui fabrique Aakash, a réduit le nombre de composants, les a achetés un par un et les a assemblés elle-même. L’appareil est fabriqué à Hyderabad.
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