Le Telangana va-t-il faire sécession? (MàJ 01.01.2010)


Andhra Pradesh & Telangana

Depuis plusieurs semaines, le parti régionaliste Telangana Rashtra Samiti a pris le devant de la scène en lançant des actions spectaculaires pour obtenir la formation d’un nouvel état, le Telangana (en blanc sur la carte), formé autour de la capitale actuelle de l’Andhra Pradesh, Hyderabad.

Hier 25 décembre, le Chef du TRS a lancé un ultimatum au Gouvernement Central de l’Inde: Si le processus constitutionnel de formation du Telangana n’est pas officiellement lancé avant lundi 28 décembre, il lancera un « bandh » indéfini, c’est à dire la grève générale illimitée.

Dans le cas du Telangana, un processus historique qui mélange occupation coloniale, développement économique accéléré, corruption et pragmatisme a conduit à cet imbroglio politique spectaculaire. Petit retour en arrière:

Comment en est on arrivé là?

Contrairement à la plupart des revendications séparatistes (de « bifurcation », comme on dit en Inde), la question au Telangana est celle de la répartition des richesses, pas celle des divisions ethniques.

Champs de Riz en Andhra Côtier

Les habitants de l’Andhra côtier ont bénéficié d’un développement économique meilleur sous l’occupation anglaise qui a développé l’irrigation, tandis que la région d’Hyderabad (Telangana) est restée en arrière sous la direction du Nizam d’Hyderabad.

La revendication d’indépendance du Telangana est ancienne; elle remonte à près de 50 ans. Jusqu’à présent, elle a cependant été contenue par les gouvernement locaux ou centraux qui ont su la circonscrire électoralement et politiquement.

Hyderabad  à commencé à se développer dans les années 90 – Elle est devenue un second centre informatique dans le sillage de Bangalore.

Les propriétaires terriens de l’Andhra côtier ont déferlé sur la capitale pour investir dans l’immobilier et les projets d’infrastructures l’argent gagné dans l’agriculture. Ils se sont mis dans le sillage du premier ministre local Y S Rajasekhar Reddy, membre du Parti du Congrès, dont ils ont fiancé les campagnes pour obtenir des contrats et toutes sortes de licences.

Dans un éditorial du 3 octobre, Bharat Bhushan, rédacteur en chef du,  Daily Mail montre comment YSR s’est assuré la loyauté de ses supporters non pas en leur donnant  des postes au gouvernement mais en favorisant le développement de leurs affaires, en particulier à Hyderabad. Il cite de nombreux projets alloués à ces sociétés et les

Hitech City Hyderabad

Hitech City Hyderabad

montants correspondants.

On était dans un savant équilibre de pragmatisme, de développement, de clientèlisme et de corruption, situation assez classique dans l’Inde moderne où les politiciens tentent de concilier traditions politiques anciennes et développement accéléré. Ce sont donc les bénéficiaires du système qui craignent aujourd’hui que la création de l’Etat du Telengana ne mette leur richesse en danger.

YSR est mort dans un accident d’hélicoptère le 2 septembre 2009. L’organisation de sa succession par le Congrès a été chaotique (son fils a tenté de se faire élire…). Son ancien ministre des finances Konijeti Rosaiah est maintenant au pouvoir en Andhra Pradesh mais semble manquer des qualités de son prédécesseur…

  • En novembre, K. Chandrasekhara Rao –  Chef du Telangana Rashtra Samiti – entame une grève de la faim, essentiellement pour redorer son blason suite à une défaite électorale.
  • Peu après, P. Chidambaram, Ministre de l’Intérieur fédéral à New Delhi, annonce que le processus de séparation va être initié et que des consultations vont commencer.
  • 20 ministres du gouvernement local menacent de démissionner. Face à la pression des opposants au processus – qui appartiennent, rappelons le, au Parti du Congrès au pouvoir, le Gouvernement Central fait volte face et suspend le processus.
  • Le 24 décembre, 63 députés au parlement local démissionnent et 13 députés au parlement central et plusieurs ministres locaux menacent de faire de même, cette fois pour protester contre le revirement du Gouvernement central.
  • Des deux côtés du conflit, les politiciens sont agressés par leurs opposants, parfois physiquement.
  • K. Rosaiah semble incapable de dégager une ligne claire. Les politiciens locaux font donc massivement appel aux instance dirigeantes du Parti du Congrès pour sortir du conflit: La balle au Centre…

Rien n’est fait

Une sécession du Telangana serait sans doute le pire des remèdes à ses difficultés économiques. Comme le relève The Hindu, grand quotidien du Sud, dans un éditorial qui a fait sensation, « Si le diagnostic est bon, le remède est mauvais (…)  Le problème de l’inégalité de développement entre différentes parties d’un Etat ou d’une région est l’un des défis majeurs que l’Inde moderne devra relever.  Mais rien ne suggère qu’un état plus petit soit capable d’offrir un développement plus égal« .

Rien n’est donc fait: En pratique, le gouvernement central semble capable de jouer la montre jusqu’aux élections de 2014. Il y a, et il y aura, beaucoup d’agitation, mais c’est chose courante en Inde et, la plupart du temps, ce type d’action est plus dicté par l’ambition personnelle de politiciens en quête de notoriété que par des idéaux réellement politiques ou idéologiques.

MàJ  (27 déc 2009)

Ce soir, dimanche, le premier ministre indien Manmohan Singh annonce que tout processus est bloqué jusqu’à l’atteinte d’un consensus…Chose amusante, c’est Monsieur Bhattacharjee, premier ministre du Bengale Occidental, qui fait lui même face à des problèmes similaires, qui annonce la position du Centre. Tout ça pour ça?

MàJ  (1 Janvier 2010)

12 des 13 ministres ayant remis leur démission la reprennent… Ah, le retournage de veste, sport national, commence…

Air India survivra-t-elle aux assauts de ses actionnaires ?


Air India's Fleet

Air India's Fleet

Une gazelle re-née dans un éléphant: La défunte Air Afrique, passée dans l’au-delà en 2002 et surnommée Air Sans Fric, a-t-elle tracé la voie pour Air India?

Le sort de la compagnie nationale et nationalisée indienne n’en finit pas d’être réglé. La compagnie a perdu plus d’un milliard de dollars en 2008 et prévoit une perte équivalente en 2009. Sa dette excède 3 milliards de dollars.

Le Ministre de l’Aviation Civile vient d’approuver un plan de recapitalisation, sous conditions de restructuration, de plus d’un milliard de dollars. Il indique au Financial Times que c’est un signal clair : A moins d’un redressement, le Gouvernement cessera de soutenir la Compagnie. Mais, s’interroge le correspondant du FT, combien de fois a-t-on déjà entendu cela ?

Air India va d’un plan de restructuration à l’autre, y compris une fusion partielle et ratée avec la compagnie domestique Indian Airlines (seuls les noms ont « fusionné », rien n’a changé).

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« Ministères lucratifs »: La corruption indienne au grand jour


Beaucoup d’appelés, pas assez d’élus: La constitution d’un gouvernement indien se heurte – comme partout – aux ambitions de prestige et financières des innombrables candidats.

State Bank of India ATM

State Bank of India ATM

S’y ajoute la chasse aux « ministères lucratifs », appelés aussi les « ATM Ministries » ou ministères distributeurs de billets de banque… Ce sont les ministères qui gèrent les plus gros contrats et qui traitent le plus avec le secteur privé: Transports, Energie, Aviation Civile, Telecom, Mines… Le Ministère de l’Environnement, avec son droit de véto sur les projets des autres Ministères, est devenu le Ministère ATM le plus convoité.

Enfin, il y a les ministères qui donnent à leur titulaire plus de pouvoir que d’argent: Ils permettent au politicien de distribuer les avantages à leur électorat: Le Ministère des Chemins de Fer qui permet de distribuer argent et emploi est un exemple typique de « double effet kiss cool ».

C’est avec leurs alliés du parti régional tamoul DMK que Manmohan Singh et Sonia Gandhi rencontrent lesplus grandes diffficultés pour former le Gouvernement central indien.

M. Karunanidhi, Manmohan Singh, Sonia Gandhi, Pranab Mukherjee, A.J.Antony (Reuters)

M. Karunanidhi, Manmohan Singh, Sonia Gandhi, Pranab Mukherjee, A.J.Antony (Reuters)

Compte tenu de l’échec patent des ministres du DMK dans l’ancien gouvernement et des allégations insistantes de corruption à leur égard, le premier ministre cherche à s’entourer de ministres capables issus du DMK. Le problème, c’est que les minsitrent occupaient les « ministères lucratifs » des communications (y compris les télécommunications) et des transports de surface (y compris les chemins de fer). Il semble qu’on s’achemine vers un retour des ministres concernés, mais à des postes moins « lucratifs »  comme par exemple l’éducation ou moins visibles ou les mines qui permettent de s’enrichir de façon moins médiatisée.

Le DMK fait valoir ses exigences sans la moindre honte. Elles sont en partie « dynastiques »: M. Karunanidhi, 86 ans, leader du DMK et Premier Ministre du Tamil Nadu a commencé par exiger 5 postes ministériels dont au moins 4 pour des membres de sa famille. Cette histoire crée des conflits internes à la famille sur qui pourrait obtenir quel job…